dimanche 3 novembre
On remonte un peu au Nord, et on visite le
fort d'Agadem. L'eau n'est qu'à quelques dizaines de
cm. La montagne est belle, et la plaine ressemble à une sebkra. On remonte lentement vers le Nord et on trouve 1 ou 2 familles
installées vers un puits.
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Beaucoup de méfiance réciproque, mais le commerce reprend le dessus. Les femmes nous sortent quelques pacotilles.
On sort du massif d'
Agadem et on se trouve en plein sable, assez roulant au début.
Puis les choses se gâtent, et en contournant de grandes cuvettes, Warta se plante, et Pascal en tentant de l'aider tombe en
panne. Voyant le spectacle, j'ai évité ce trou et j'attends en haut de la dune en surveillant le fond du trou aux jumelles.
Warta sort le premier, mais Pascal ne bouge pas et lève le capot. Je redescends à contre cœur. Le Land tourne très bien au
ralenti mais cale dès la moindre accélération.
Raymond découvre qu'une Durit d'air du turbo se comprime dès la montée en régime. Démontage fébrile. Cette Durit est gainée de
l'intérieur, et la gaine s'est décollée. Grosse discussion. On arrache la gaine, on la jette, on remonte le tout, et Pascal
repart du premier coup. Le garage en France le consolera (?) en lui disant que la panne est connue...
Arrivée à
Dibella. C'est l'heure du piquenique. Warta nous trouve une très belle ombre et on
s'installe. Christian, très ému, nous dit qu'il a l'impression d'avoir vu à l'entrée de l'oasis un type seul qui le regardait
éperdument. Il est sûr qu'il s'agit d'un naufragé qui a besoin de secours, et il fait campagne pour monter une expé. Je ne mords
pas à cet hameçon et le laisse faire.
Pascal qui est moins insensible accepte, et les 2 Lands partent en sauvetage. Ils reviennent avec le sourire : en suivant les
traces jusqu'à l'endroit fatidique, ils ont sauté la dune, et sont tombé quasiment dans le puits, entouré d'une caravane de 100
bêtes, dont les chameliers prenaient leurs ablutions. Surprise des 2 bords, rigolades, et recul immédiat à cause des chameaux
qui ne riaient pas du tout. Ce sauvetage a été longuement commenté.
Repas sous les palmiers doums, avec des noix de palme fraîchement tombées partout. Balades à pied pendant la sieste. Au départ,
on discute d'un tas de poubelles fraîches qui ont manifestement été posées là par des européens immondes. On ramasse tout dans
un grand sac que Warta range dans son auto.
Pour sortir de l'oasis, il faut escalader une dune au nord-est. On découvre dans la montée qui se fait plein pot, plusieurs
caravanes montantes et descendante. Le spectacle est extraordinaire, on s'arrête en pleine pente pour ne pas effrayer les bêtes
et faire des photos. C'est le début d'un chapelet quasi ininterrompu de caravanes de 20 à 50 bêtes, dont la plupart descendent
au Sud. Ibrahim remonte les traces par simplification. C'est magnifique, il y en a dans toutes les situations.
Elles sont distantes de la durée qu'il faut pour abreuver à chaque puits. Les caméscopes et appareils photos ne savent plus où
donner du chameau. La lumière se réchauffe de plus en plus, et le spectacle devient grandiose. À l'heure de la halte, nos guides
avisent un petit massif noir qui émerge de cet océan de dunes :
Ehi Hourta. Le coin est étroit,
mais splendide, et j'assiste au coucher de l'astre depuis le sommet de ce frêle esquif.
Horreur, je vois d'en haut Araly qui creuse le sable et cache le sac poubelle de
Dibella...
lundi 4 novembre
Départ tranquille. Les caravanes sont toujours là. On en découvre même une en fin de bivouac depuis le sommet d'une dune.
Re-splendide. Arrivée à
Zoo Baba. Tout le monde s'est préparé pour cette rencontre, car nous
avons des amis dans cette oasis depuis notre dernier passage en 2001.
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Séquence émotion lors de la visite de l'école. L'instit et sa femme sont toujours là, et toujours sympas. Séances photos et
distribution de cadeaux.
Les filles acceptent toutes le marché cadeau contre photo. En fin de séance, il ne reste pas grand choix dans les habits que
nous distribuons. Martine sort un anorak de sa mère en goretex d'un look extra à
Zoo Baba.
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La fille est ravie, mais toutes les précédentes reviennent furieuses car elles voulaient justement celui-là. Pas si simple !
Dès la sortie de l'oasis, on rentre un moment dans les cailloux, et on trouve des milliers de chameaux avec des chameliers et
des chargements multicolores : c'est la saison du ravitaillement, et tout le
Kaouar s'anime pour
acheter les provisions.
Vers
Zoo Karémi, on s'arrête pour voir ce défilé ininterrompu. J'ai un genou en terre pour
photographier lorsqu'un chamelier passe avec un
large sourire pendant qu'un coup de vent lui vole son chapeau pour me le donner. Je lui rends son bien et il me paie en
sourire.
Il faut bien finir par sortir du massif car on ne peut pas y suivre les traces de caravanes. On rentre alors dans de grandes
plaines de fech-fech où il faut bien lâcher les moteurs si on veut pouvoir s'échapper. Folles séquences de panaches blancs.
piquenique à midi en zone de montagne. Warta veut téléphoner à Raïcha, et je me la joue avec mon téléphone satellite sous mon
grand chapeau Peul.
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Arrivée à
Bilma. Formalités. Warta me demande de l'accompagner chez les militaires. Salamalecs
de tradition. Quand on s'est tous demandé des nouvelles de tous les neveux de nos arrières grand oncles, on entame le sujet.
Lentement s'il vous plait. Après une demi-heure de discussion, Warta me demande de payer 5'000 CFA, ce que je fais sans
problème.
La détente est immédiate, et les militaires me proposent de goûter le ragoût qu'il prépare. Je trempe un bout de pain dans la
sauce et m'émerveille publiquement. La satisfaction est communicative, et je quitte nos hôtes dans la bonne humeur. Warta est
gêné, car nous sommes partis sans reçu, et il est clair que nous venons de participer à un des rackets les plus célèbre du
Sahara.
Je le console en lui disant que j'ai quand même eu un bout de pain mouillé de sauce, et que nous n'avons qu'à considérer que
nous avons pris le menu à 5'000. Après tout, grâce à lui ça ne fait que 1.27€ par voitures et ce n'est pas trop grave, sauf que
je dois régurgiter 5/6ème de mon menu pour les autres.
Départ à fond la caisse dans les rues de
Bilma, et je me retrouve seul avec Christian, abandonné
par les autres. Comme je sais qu'ils doivent passer par les
salines de Kellala, j'y vais et
tombe sur des contre-jours de soleil couchant hallucinants.
Il y a foule, mais pas nos copains. On remonte "en ville", et on se retrouve. Warta propose le bivouac à l'écart, et part plein
Ouest, mais en zigzag pour tromper les Russes. Bivouac calme en lisière du
Ténéré.
mardi 5 novembre
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Petit déj. au lever du soleil, interrompu par l'arrivée des caravanes qui partent pour le
Ténéré. Je monte sur la dune en courant, et bouffe toute mes piles dans ce spectacle
inoubliable. Nous sommes à distance, et pas un bruit n'accompagne ce glissement de milliers de chameaux entre les dunes.
On revient aux
salines de Kellala pour une visite de détail. On voit entre autres une gamine de
12 13 ans qui nous présente avec une réelle fierté son travail de la saison, quelques dizaines de moules de sel, et qui se remet
au travail aussitôt. Elle est sans doute l'esclave de quelque négociant, mais totalement soumise. Son beau visage reflète un
mélange de lassitude et d'obstination à fendre le cœur.
Départ pour
Dirkou. Christian prend dans sa benne 3 stoppeurs ravis : des boubous blanc bleu
rose volent au vent, et les Lands se photographient de profil.
Arrêt piquenique à
Dirkou, devant la base militaire. Warta s'est mis en colère contre la
"feuille de route" qu'ils essayent de lui vendre. Il a la sienne d'
Agadez, et n'a pas besoin de
celle de
Dirkou pour voyager dans son propre pays, d'ailleurs voilà ce qu'il en fait de la
feuille de
Dirkou : il la déchire et la jette en plein vent en disant qu'elle aille se perdre
dans le
Ténéré.
Warta nous abandonne le temps de faire les "papiers" en ville chez quelqu'un d'autre.
Au milieu du casse-croûte, le planton de la base vient nous chasser. Nous sommes dans la zone de protection de la base, et si
l'ennemi survient, nous serons en danger. On lui répond qu'on va faire attention aux ennemis, et qu'on dégagera sitôt le
piquenique terminé. Il rentre en traînant les pieds.
Il revient peu après, et nous supplie de partir, car sinon, son chef le punira lui. On lui répond que notre guide est parti et
qu'on n'ose pas bouger sans lui de peur de se perdre, et qu'on n'a pas d'autre rendez-vous... Il nous récite son couplet jusqu'à
la fin du repas, nous le nôtre et on dégage. Nous ne sommes pas les bienvenus en pays Toubou avec nos guides Touaregs
contestataires.
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Warta revient sur ces entrefaites, et nous dit que tout est arrangé. On rentre en ville pour ravitailler en gasoil chez le
célèbre Jérôme. Pas de pompe, tout est en fût. Négociation âpre, finalisée par le thé de l'amitié (?).
Il n'y a qu'une pompe électrique, la mienne, et je fais donc 5 voitures pendant que 2 autres utilisent des pompeurs manuels en
embuscade. Scandale au moment du départ, car le prix des pompeurs n'a pas été négocié avant, et maintenant c'est exorbitant.
Départ houleux sous les injures... Ah quand une vache à lait ne donne pas son lait, elle ne vaut plus grand-chose.
Courses au marché. Fruits légumes et... œufs que je ramène fièrement devant Christian dont le plaisir est immense de m'avoir
convaincu, lui qui achète des œufs sur ces marchés depuis qu'il est tout petit.
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Passage aux
mares d'Arigui, belle étendue d'eau d'un hectare au milieu des palmiers et au pied
du
Kaouar. J'ai demandé à visiter
Aney et Ibrahim nous engage
dans une piste sablonneuse et encombrée de végétation.
On débouche d'un seul coup en plein village, et 200 gamins nous assaillent. La caravane se repositionne en tournant autour d'un
monticule, et les gamins nous pourchassent en file indienne à cause des obstacles. Arrêt. Assaut général, mais dans la bonne
humeur. Notre arrivée leur apporte plus qu'un bon western. Mais tout le monde ne participe pas de la même manière, et je voyais
une gamine distante qui guignait de loin ce spectacle en souriant.
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Son père surgit, et la tabasse de la plus vilaine façon. Elle part en hurlant, elle n'avait sans doute pas droit à ce spectacle
impur... Ibrahim retrouve un de ses potes, et ils échangent longuement des souvenirs qui ressemblent à ceux de nos services
militaires.
On s'extirpe difficilement de cette folie. et on se choisit un bivouac à l'écart. Warta lâche le volant, Araly lui tend le
fauteuil, il s'allonge pendant que les 2 autres s'affairent. Ah, la douce condition de chef...
mercredi 6 novembre
On s'est écarté un peu du massif, et on circule sans horizon en lisière du
Ténéré. Le
Pic Zoumri se profile de très loin, indiquant la proximité de
Séguédine.
La ville apparaît dans une cuvette, vaste oasis au pied de la montagne. Visite des salines. qui semblent en moins bon état que
celles de
Kellala. Les gosses ne nous lâchent plus, mais conservent un peu de retenue. Traversée
sur
Chirfa.
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Le terrain est encombré d'affleurements rocheux qui nous obligent à de nombreux détours. Un peu de bois pétrifié. On croise 2
voitures de touristes, et une fille complètement allumée nous tient le discours sur les Touaregs et leur culture, sans se rendre
compte qu'elle est chez les Toubous. Bivouac avant
Chirfa. On se dissimule dans les rochers pour
ne pas être en vue de l'armée qui surveille le coin.
Les fauteuils s'installent, mais pas pour Araly qui doit encore réparer une crevaison. Tous les occidentaux sont sidérés
lorsqu'il sort une grosse aiguille et du fil, pour recoudre sa chambre à air. Nos Touaregs sont hilares et fiers de nous
apprendre que c'est possible, et même bien plus solide !
jeudi 7 novembre
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Arrivée à
Chirfa. Visite à l'armée, Warta y laisse sans doute quelques plumes, mais n'en parle
pas. J'ai le sentiment qu'il est perturbé par ma réflexion faite à
Bilma sur le "menu à 5'000",
et préfère assumer. La ville de
Chirfa se présente comme celle de
Séguédine, Oasis dans une cuvette au pied de la montagne.
C'est un carrefour important car les pistes de
Madama, de
Zouar de
Djanet et de
Bilma s'y
croisent. Nous avions fui cette cité en 2000 avec la paranoïa de Puthod, mais tout est paisible, surtout accompagnés.
Visite du vieux fort colonial en ruine mais avec de beaux restes. Le Marché aux touristes s'improvise rapidement, une trentaine
de vendeuses s'installent en rond avec leurs produits devant elles. Ambiance très sympa.
Visite à l'
arche de Paolo. Il m'avait passé le point GPS de cette arche, qu'il tenait lui-même
d'un notaire Lyonnais, lors de notre passage en 2000. J'ai demandé à Warta d'y passer car avec Puthod, il n'en était pas
question. Ils se sont renseignés à
Chirfa car ils n'avaient pas l'air de connaître. Évidement je
n'avais pas le nom local.
Tout se passe bien, on y arrive facilement. Bel endroit. À la fin de la visite, Warta nous réunit discrètement et nous explique
qu'une agression vient de se produire sur la piste de
Chirfa à
Djanet, et que nous ne pourrons pas visiter
Er Roui et le
Dissalak comme le programme le prévoyait.
Consternation, et début d'inquiétude pour le retour, car c'est par cette piste que nous devions rentrer. Les gens de
Chirfa semblent bien connaître la bande qui a fait le coup et son lieu de retraite, et ce sont
sûrement des potes du célèbre Youssouf qui nous a braqué en 2000.
Visite de
Djado très paisible. Nous croisons un groupe de Français du 3ème âge, piloté par
Michel Zalio, voyagiste et écrivain, que nous avons rencontré au salon du livre de montagne au Fayet quelques mois auparavant.
Il présentait son beau livre Bivouac Africain. Nous nous reconnaissons. Il est accompagné par l'
agence Adrar Madet.
Nous essayons de parler de l'agression, mais ils disent ne rien savoir, et écartent leurs (vieux) clients rapidement.
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Visite calme et approfondie de
Djaba, puis de
Ouarek. Les FARS
ont disparu. Visite de la petite arche, puis de la
source d'Orida. Warta nous trouve un bivouac
dans la plaine au-delà.
vendredi 8 novembre
Arrivée à la
Cathédrale, point extrême autorisé cette année. Ça sent la fin de voyage, et des
prémices de nostalgie apparaissent. Il fait trop chaud, et mes projets de grande balade à pied fondent comme neige au soleil. Le
retour est inéluctable et commence ici.
On repasse par
Orida où Marylène fait un sérieux malaise. J'escalade quand même la belle
montagne au dessus de la source. On repasse à
Chirfa. Warta achète de grands colliers de dattes
sèches, car dit-il, ce sont les meilleures du
Sahara.
Warta nous conseille de redescendre à
Agadez pour rentrer par
In Guezzam et
Tamanrasset. Nous choisissons le
Ténéré en hors-piste jusqu'à
Djanet, pensant que les bandits ne
sont pas restés sur le lieu de leur méfait.
On souhaite faire ce parcours d'une seule traite et à vive allure. On vise donc le col des Chandeliers pour un dernier bivouac
avec nos guides et amis.
La discussion se crispe sur les tarifs. Warta réclame une rallonge pour le retour, je suis obligé de lui ressortir nos faxes et
de lui rappeler que le voyage vient d'être écourté, sans changement de prix. Je n'ai aucune marge de manœuvre car Yves et ses
supporters sont absolument opposés à toute rallonge, trouvant déjà que ce voyage n'a pas tenu ses promesses, que c'était trop
lent, que leurs Touaregs ne savent que faire la sieste etc...
Je compenserai le lendemain matin, à titre personnel et sous forme de pourboire, ce que j'ai refusé la veille. Tension dans
l'équipe.
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